- Qatar : boycotter ou pas ?

Le 24 novembre 2022, Emmanuel Macron estimait qu’il ne fallait pas « politiser le sport » dans l’attribution des lieux d’accueil des grands rendez-vous sportifs.

Le 26 novembre 2022, lors du match
de l’équipe de France contre le Danemark, le même tweetait : « Cette Coupe du monde de football, la première organisée dans le monde arabe, témoigne de changements concrets qui sont à l’œuvre. Le Qatar s’est engagé dans cette voie et doit continuer. Il peut compter sur notre soutien. »

Nous ne sommes pas à une incohérence près du chef de l’Etat. Le « en même temps » montre ses limites : il lui permet de ne pas effectuer de choix … sinon celui de l’incohérence !
Je ne commenterai pas les absurdités d’Emmanuel Macron : je suis limité en nombre de signes !



Alors Coupe du monde au Qatar : boycott ou pas ?

Grand amateur de foot, je me suis promis, à titre personnel, de ne pas regarder un seul match à la télé. Simplement par respect pour tous ces morts. Notre terrain de jeu est leur cimetière ! C’est une profanation.

Même si les questions demeurent nombreuses, je ne comprends pas ces appels au boycott si tardifs :
- pourquoi climatiser les stades alors qu’il fait actuellement 30-32 degrés au Qatar ? Les autres coupes du monde, jouées en juin et juillet, ne se déroulaient-elles pas sous des températures similaires ?
- pourquoi un retournement de situation de dernière minute quant au débit de boissons alcoolisées aux abords des stades ? Si le fond de cette interdiction peut sembler légitime, sa forme et son timing questionnent.
- l’article 57.1 du règlement de la FIFA interdit tout message politique, religieux ou toute annonce personnelle sur la tenue des joueurs. Pourquoi, au Qatar, cette interdiction, limitée aux joueurs, s’applique-t-elle aussi aux supporters ? Une liberté de plus annihilée.

La désignation du Qatar comme pays organisateur remonte à décembre 2010. Douze longues années où notre silence fut complice. Douze longues années où nos petites compromissions ont nourri les puissants. Douze longues années où nous avons accepté que cette monarchie finance des infrastructures sportives dans nos quartiers et notre championnat de Ligue 1.

Toutes ces revendications ne cachent-elle pas une discrimination inavouable? Ne seraient-elles pas un prétexte ?

L’arbre de nos revendications présentes, cachent la forêt de notre indifférence :
aux conditions de vie des travailleurs locaux,
- à l’impact environnemental
- à la place des femmes,
- au droit des minorités LGBTQ+
- aux atteintes à la liberté en général,
- …
Ces atteintes aux Droits de l’Homme et à la planète existaient bien avant la préparation de la Coupe du monde et perdureront encore après sans que plus personne ne s’en émeuve. Le Qatar c’est loin !!!

L’arbre de nos revendications présentes, cachent la forêt de nos vieux réflexes coloniaux.
Notre vrai problème n’est-il pas que, pour la première fois, un pays musulman (il s’agit en plus d’une monarchie théocratique) organise avec succès un événement planétaire ?
Finie la prédominance des blancs, des occidentaux sur les arabes !
Si la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud apparaissait comme une première pour le continent africain, celle au Qatar est révolutionnaire.
Fini notre empire ! Les Musulmans s’émancipent, peuvent réussir sans nous , … voire contre nous.

L’arbre de nos revendications présentes cachent l’aveu de notre mal-être. Celui de notre complexe; complexe de Suez comme le définit justement le sociologue de Raphaël Liogier. Ce « racisme culturel » dont les Européens feraient preuve à l’égard des populations arabes, perçues comme essentiellement musulmanes.


Pour que les croyances cohabitent, pour que notre pensée s’affranchisse de ce réflexe mortifère, il nous faut renoncer à l’idée même de détenir la vérité.
Le chemin est encore long … nous n’aspirons pas au repos.

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Mise a jour le 27.06.2024